Culture & Divertissement: Fatima Bououchane - parcours d'une pionnière du cinéma amazigh

Posté par: Visiteursur 04-09-2007 01:20:54 1870 lectures Qui de nous n'a pas vu «Boutfounast,Tihiya,Tamghart N'ourgh, Tiguiguelt »? Ces films cent pour cent amazighs faits par les pionniers de ce jeune cinéma qui sont le plus souvent méconnus du public et qui ont pourtant fait rire et pleurer les spectateurs jusque dans les douars perdus dans le Souss profond et dans les autres régions amazighophones. Fatima Bououchane est l'une d'entre-eux.

Après ses études primaires, Fatima Bououchane se découvre un penchant pour la poésie arabe et amazighe.À l'âge de seize ans,elle devient une « tannaddamet » à l'instar « des innadamen » amazighs du Souss.


En 1970,feu Si Abdallah Anidif,grand journaliste et animateur de la chaîne amazighe de la RTM,plus connu sous le pseudonyme de «Âammi Moussa», lui confie la présentation d'une émission radio en langue amazighe intitulée : «Lhadit N'tamghart » qu'elle présentera sur les ondes de radio Agadir tous les jeudis pendant deux ans. Puis, la jeune Bououchane quitte Agadir pour aller s'installer à Laâyoune où elle travaille pendant trois ans dans une société industrielle du secteur de la pêche .

Après une période de treize ans à Lâayoune,elle rentre définitivement à Agadir. Disposant d'un petit budget et ayant rédigé le scénario de son premier film à l'époque « Ghaylli Ikkerze Imguert». Il a moissonné ce qu'il a labouré), elle s'est mise dans l'idée de le produire et d'y jouer un rôle.Elle part alors à la recherche de personnes pouvant l'aider dans sa nouvelle aventure. A cette époque-là, les trois films cultes du cinéma amazigh étaient déjà sortis : Tamghart N'ourgh «la femme en or» (89), Boutfounast «l'homme à la vache » (90) et Tiguiguelt «l'orpheline» (91).

Ne connaissant personne dans le milieu de ce jeune cinéma,elle parle de son projet à Mohamed Oualkach,journaliste bien connu à Agadir,alors collaborateur externe à la radio qui lui conseille de contacter Ahmed Baddouge de l'Association Tifaouine.Elle ne pouvait mieux tomber puisque ce dernier se préparait justement à monter une nouvelle création théâtrale intitulée : « Taggoudi ».Elle rencontre aussi la grande diva de la chanson amazighe,Fatima Tabâamrant,qui lui donne de judicieux conseils dans ce domaine.

L'un de ses proches lui ayant appris que Mohamed Outaleb de Sawt Mzouda de Casablanca recherchait une actrice pour son prochain film : «Littihal Oumghar » (Le mariage du Cheïkh de la tribu) , elle prend aussitôt contact avec ce dernier. Après ce film-là, la voie était ouverte.Aujourd'hui , Fatima Bououchane compte à son actif quelques 70 films.

Autodidacte,Fatima Bououchane est devenue,à force de recherche et d'efforts personnels,une excellente maquilleuse très sollicitée par les réalisateurs marocains.C'est le cas de Kamal Kamal pour "Taïf Nizar", Hassan Bouchlikha pour "Le Facteur" et "Lamdamma", Mustapha Fakhir pour "Attayaba". Elle joue dans d'autres films comme "Hammou Ounamir" et "Douiba de Fatima Boubkdi" et "Al Makroum" de Daoud Oulad Sayad.Elle a aussi travaillé sous la direction d'autres réalisateurs tels que Ahmed Baddouge, Lahoucine Bouizgaren ,Brahim Chkiri et Aziz Oussayeh.

Fatima Bououchane a écrit le scénario de plusieurs films dans lesquels elle a également tenu un rôle. On citera à titre d'exemple : "Hmad Inou", "Ghaylli Ikerze" "Imguert, Iouriqen", "Ghassad dari", "Sbh dark" . Elle réalise deux films : "El Famila" (La famille) et "Boulamlayen" (Le millionnaire) et elle prépare actuellement "Tallayet" (Le régime de dattes) avec Messaoud Lyazidi de Disco Vision Inezgane.

Pour Bououchane,le jeune cinéma amazigh doit beaucoup à des maisons de production comme Warda Vision et Sawt Mzouda de Casablanca,Ayouz Vision et Disco Vision d'Inezgane et Chtouka Vision de Biougra.On peut ajouter également le dernier projet de la film Industry de Nabil Ayouch qui a permis de faire connaître plusieurs jeunes acteurs amazighs d'Agadir et de la région.

Des précurseurs comme Lahoucine Bouizgaren ,Ahmed Baddouge et Fatima Bououchane peuvent être confiants quant à l'avenir du jeune cinéma amazigh, car la relève est assurée avec la montée de techniciens et réalisateurs amazighs. Cependant, ce cinéma, qui bénéficie d'une grande popularité auprès du public marocain, a besoin du soutien des pouvoirs publics, et notamment le ministère de la Culture, le Centre cinématographique marocain (CCM), sans oublier, bien sûr l'IRCAM (Institut Royal de la culture amazighe).

Libération