ONA : Fadoua Moutaouakil explique les normes IFRS

Date 05-11-2007 21:15:14 | Sujet : Actualité Maroc

On le signalait la semaine dernière, l’ONA a organisé le 18 octobre, à l’attention des journalistes et analystes financiers, une réunion d’information autour des normes IFRS. Le Président de l’ONA Saad Bendidi et son staff donnaient ainsi toutes les explications sur le passage du groupe ONA aux normes IFRS et faisaient une présentation détaillée des impacts financiers de ce passage sur les comptes du groupe qui compte, on le sait une centaine de filiales. Une réunion suivie avec beaucoup d’intérêt, le groupe ONA étant précurseur, au Maroc, en matière de publication des comptes consolidés aux normes comptables et financières IAS/IFRS.

Avec Fadoua Moutaouakil, Expert comptable, directrice du contrôle de gestion, consolidation, comptabilité & IFRS et ingénierie Financière à la direction de la stratégie financière du groupe ONA - qui faisait partie du staff accompagnant Saad Bendidi lors de cette réunion d’information - nous nous arrêtons sur certaines précisions relatives aux normes IFRS sur lesquelles se focalise l’attention de tous les opérateurs (et observateurs en général) parce qu’elles représentent l’avenir...
Si vous deviez nous expliquer, en quelques mots, la différence entre le référentiel comptable marocain et les normes IFRS, que nous diriez-vous ?

LES normes internationales IAS/IFRS consacrent la notion de juste valeur et privilégient la prééminence de la réalité économique sur l’apparence juridique (substance over form), contrairement au référentiel comptable marocain qui est plus basé sur une approche patrimoniale et juridique.

Cependant, il est important de signaler que les normes internationales ne s’appliquent qu’aux comptes consolidés, les comptes sociaux, quant à eux, sont toujours élaborés selon les principes comptables marocains.

Pouvez-vous nous expliquer la notion de juste valeur ?

Selon l’International Accounting Standards Board (IASB), la juste valeur est le montant pour lequel un actif pourrait être échangé ou un passif éteint entre parties bien informées, consentantes et agissant dans des conditions normales de concurrence.

De façon très schématique, la juste valeur correspond à la valeur de marché d’un actif, par exemple. Plusieurs méthodes sont alors possibles pour déterminer cette juste valeur. Prenons quelques exemples...

Evaluer un immeuble à sa juste valeur revient à prendre sa valeur de marché, à savoir le montant qu’un tiers serait prêt à vous proposer pour s’en porter acquéreur, Mais certains actifs ne profitent pas d’une valeur de marché directe. Alors plusieurs méthodes d’évaluation sont possibles. Par exemple, la valeur peut être déterminée à partir des flux de trésorerie/avantages économiques futurs attendus de l’actif, c’est-à-dire qu’on fait la somme actualisée des richesses qu’on s’attend à obtenir de cet actif.

Ces exemples ne sont pas exhaustifs. Il existe bien d’autres méthodes possibles, mais ce sont celles qui sont le plus généralement utilisées.

Vous disiez que lorsqu’un groupe passe aux normes IFRS et que, plus tard, son management prépare son bilan d’ouverture IFRS, il lui faut d’abord décider quelles options et règles il retiendra et appliquera définitivement à l’ensemble du groupe. Pouvez-vous nous dire ce qui détermine ce choix ? Il y a plus de transparence avec certaines normes qu’avec d’autres ? Plus de facilité ? De crédibilité ?

Tout d’abord, lorsqu’un groupe adopte le référentiel IFRS, il faut entendre l’ensemble des normes et interprétations en vigueur que ce soit en date de transition ou à la date de publication de ses premiers états financiers. De plus, cette conversion aux normes internationales d’information financière suppose également un retraitement rétrospectif du passé comme si les états financiers du Groupe ont toujours été élaborés conformément aux IAS/IFRS.

Afin de faciliter cette transition et eu égard à la complexité de certains retraitements, l’IASB (International Accounting Standards Board) a développé la norme IFRS 1 « première adoption des normes internationales d’information financière) qui prévoit un certain nombre d’exemptions, telles la mise à zéro des écarts de conversion de toutes les activités à l’étranger à la date de transition, la possibilité d’évaluer certaines immobilisations à la juste valeur et de retenir cette juste valeur comme coût présumé à cette date...

Par ailleurs, les normes internationales prévoient un certain nombre d’options et il convient à chaque groupe, en fonction de ses pratiques, de son secteur, des options retenues par des groupes similaires, des projets d’évolution des normes elles mêmes... de retenir celles qui refléteront au mieux la réalité économique dans la continuité (permanence des méthodes). Par exemple, la norme IAS 1 relative à la présentation des états financiers prévoit pour le bilan une distinction obligatoire des éléments courants vs non courants. Cependant, une présentation par ordre de liquidité est admise si l’information est plus appropriée et plus fiable notamment pour les établissements de crédit.

Autre exemple, pour les entreprises contrôlées conjointement, la norme IAS 31 prévoit soit de retenir la méthode de l’intégration proportionnelle comme dans les principes marocains, soit la méthode de la mise en équivalence comme ce qui est retenu dans les US GAAP.

Chaque groupe optera donc pour telle ou telle méthode en fonction de ses pratiques antérieures de consolidation ou encore en fonction des évolutions normatives pressenties dans le cadre du rapprochement des normes internationales avec les US GAAP (suppression possible de la méthode d’intégration proportionnelle).

Compte tenu de l’expérience du groupe ONA, y a-t-il de grandes difficultés à passer du référentiel comptable marocain aux normes IFRS ?

Le passage du référentiel comptable marocain aux normes internationales d’information financière (IAS/IFRS) requiert non seulement un diagnostic comptable et financier exhaustif des divergences entre les traitements effectués dans le premier référentiel par rapport à ceux exigés dans le second, mais également une réflexion de fond sur les systèmes d’information financière existants, notamment leur capacité à fournir l’ensemble des informations nécessaires audit passage. De plus, il y a des très fortes interactions entre les différentes directions du Groupe, dans le sens où certaines normes touchent à la fois la direction production, le juridique, les ressources humaines... Une bonne communication entre les différents intervenants est primordiale pour la réussite d’un tel projet de conversion.

Enfin, certaines normes sont plus difficiles à mettre en œuvre que d’autres. Il s’agit en l’occurrence de l’application de l’approche par composants et de la revue des durées d’utilité pour les immobilisations (IAS 16), de la mise en place des normes IAS 32/39 et IFRS 7 relatives aux instruments financiers (actifs et passifs financiers et les instruments de couverture), et du calcul des engagements vis-à-vis du personnel qui implique le recours à des études actuarielles pour déterminer le niveau d’engagement du Groupe...

Pour une société qui passe aux normes IFRS, quels sont les avantages ? En dehors de la transparence qui est désormais exigée par les investisseurs étrangers et de la mise à niveau comptable qui est un objectif pour toute entreprise d’envergure, y a-t-il d’autres avantages, pour l’entreprise elle-même, par exemple... ?

Les IFRS constituent un langage financier international. Il est indispensable d’avoir un langage commun avec les partenaires et investisseurs étrangers. De plus, c’est un gage de la qualité de l’information fournie.

En effet, si le changement de référentiel ne permet plus de comptabiliser certaines provisions « prudentes », de nombreux engagements hors bilan du Groupe en principes comptables marocains sont désormais à comptabiliser (engagements de rachat de minoritaires, contrats de location financement, valorisation des instruments financiers, avantages du personnel...).

De ce fait, les IFRS constituent une opportunité pour le Groupe de communiquer une information financière de grande qualité représentant au mieux sa réalité économique.

Cette évolution de qualité se voit notamment dans l’évolution des notes annexes des comptes consolidés qui sont beaucoup plus détaillées en IFRS qu’elles ne l’étaient auparavant.

Vous disiez que pour produire les Etats financiers IFRS, il fallait appliquer l’ensemble des normes à tout le groupe sans exception. Pourquoi cela ? Est-ce parce qu’il y a le risque de tricher en « cachant » quelques mauvais résultats dans les comptes des filiales ?

Il faut savoir que, selon la norme IAS 1 « Présentation des états financiers », pour qu’un Groupe puisse se déclarer full IFRS, il faut qu’il applique l’ensemble des normes et interprétations en vigueur applicables, sans aucune exception. Cette conformité aux IAS/IFRS doit être confirmée dans la note aux principes comptables contenue dans les notes annexes.

Par ailleurs, les principes comptables retenus doivent être appliqués de façon homogène dans l’ensemble des filiales du Groupe. Cela nécessite, bien entendu, une certaine permanence dans les méthodes comptables retenues, dans un souci de fournir une information économique pertinente.

Le Reporter



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