Rapport de la Cour des comptes : La gabegie des Chambres de commerce

Date 11-11-2008 22:08:58 | Sujet : Economie

· Dépenses fictives, gaspillage, marchés sans appel à concurrence...
· Centralisation du pouvoir, plan d’action non accompli… des problèmes de gouvernance


On n’est jamais mieux servi que par soi-même! C’est ce que l’on doit sûrement penser dans certaines Chambres de commerce et d’industrie (CCI) où l’on s’offre des marchés sans aucun respect des dispositions du règlement intérieur de la Chambre.
Une belle illustration est offerte par la CCI d’Agadir que la Cour des compte a épinglée dans son dernier rapport. Celle-ci n’a pas trouvé mieux, pour une souscription de polices d’assurance, que de s’adresser à un bureau de courtage propriété de… son président! Il ne s’agit pas d’un fait singulier puisque les services de la Cour des comptes stigmatisent, sans donner plus de précision, le non-recours à la concurrence pour certaines prestations comme les travaux d’aménagement des locaux de la Chambre. Sont également pointés du doigt des dépassements de seuils de dépenses autorisés pour certaines rubriques ainsi que des fausses imputations pour certaines dépenses.
Un grief qui n’est pas spécifique à la CCI d’Agadir puisqu’il revient pour les trois Chambres (celles de Casablanca, Tanger et Agadir) qui ont été auditées dans le cadre de cet exercice. Des faits qui illustrent, si besoin, les dysfonctionnements qui minent ces structures, censées appuyer le tissu économique de la ville et constituer une force de proposition auprès des instances de décision du pays. Dans le cas de Casablanca, le manquement est encore plus frappant puisque la Cour met en évidence des dépenses non justifiées. C’est le cas notamment d’une somme de plus de 3,9 millions de DH sans justification d’emploi. La somme s’étant apparemment volatilisée entre deux mandats! En effet, souligne le rapport, «lors de la passation de consignes entre le président sortant et celui entrant le 20 juillet 2000, le solde du compte bancaire de la CCIC était créditeur de 1,763 million de DH.
Le 09 juillet 2006, date de fin de mandat du président sortant, le solde était créditeur de seulement 2.952,89 DH, sans que l’emploi de ces fonds n’ait été justifié non plus»!
Pour la CCI de Tanger, c’est plutôt un important cumul d’impayés qui est relevé. Des impayés liés souvent à un problème de gestion et de gouvernance. En effet, la Cour des comptes relève une «consommation excessive et non rationalisée du téléphone». Ce qui a porté la facture téléphonique à plus de 1,26 million de DH de 2001 à fin février 2007. Le président de la CCI de Tanger, dans sa réponse, impute ce «montant exorbitant à l’utilisation de deux lignes! Outre le téléphone, le rapport pointe d’autres sources de dépenses excessives. Il s’agit notamment de la location de bureaux administratifs sans exploitation avec les charges d’eau et d’électricité y afférentes. Le tout ayant engendré un contentieux mal suivi qui, souligne le rapport de la Cour des comptes, «a abouti à maintes reprises à la saisie du compte de la CCI de Tanger par les créanciers». Un état de fait que le président estime réglé puisque, affirme-t-il, «toutes les dépenses de fonctionnement enregistrant des augmentations injustifiées ont été maîtrisées»!
Sur le chapitre organisationnel, les services de la Cour des comptes pointent du doigt la centralisation du pouvoir au niveau de l’organe exécutif, en l’occurrence le président de la CCI. C’est particulièrement vrai pour la CCI de Casablanca où l’on relève «des difficultés de communication et de coordination avec le directeur».
Un problème que l’on relie, en partie, à l’instabilité de ce poste. Ce qui induit un «fort taux de rotation dans ce poste» comme cela a été relevé pour le cas de la CCI de Tanger. La liste des dysfonctionnements ne s’arrête pas là puisqu’elle s’étend aussi à la gestion comptable et financière.
La Cour pointe notamment la non-application de la comptabilité générale conforme au Code général national de la comptabilité (CGNC). Plus globalement, la Cour des comptes critique aussi le nombre pléthorique des CCI (28 au total) qui contribue à la déperdition des ressources et, partant, mine les efforts des CCI.

RĂ©gime de retraite: CIMR ou RCAR?


Un des griefs récurrents relevés par les services de la Cour des comptes a trait au régime de retraite. En effet, le statut du personnel des CCI préconise l’affiliation au RCAR et non à la CIMR. Dans une réponse détaillée, le président de la CCI de Casablanca précise que cet état de fait perdure depuis plus de 30 ans.
Depuis 2005, avec le lancement du programme des départs volontaires, la question a été discutée avec les départements de tutelle, mais sans résultat. Et pour cause, d’une part, «l’absence de convention entre les deux caisses ne permettait pas un basculement vers le régime indiqué». D’autre part, «le transfert d’affiliation pour le régime RCAR requiert le paiement, au profit de ce régime, de sommes colossales pour le rachat des cotisations des années précédentes».
Sans oublier que ce changement signifie «l’impossibilité de conservation des points d’ancienneté des employés. Aussi, «il a été décidé de maintenir l’actuel régime de retraite», conclut le président de la CCI de Casablanca.

Généreuses, les Chambres de commerce!


Sur le chapitre patrimoine, les services de la Cour des comptes relèvent de nombreuses aberrations. Des locaux en location par les CCI sont occupés «sans contrepartie» par des structures privées ou publiques.
C’est le cas, entre autres, pour la CCI de Casablanca où une partie de son siège en location a été mise à la disposition, depuis 1998, d’une
école d’enseignement privé… sans contrepartie! Selon le président de la CCI, un procès a été intenté à l’école en question et un jugement en
référé a été rendu pour libérer les locaux occupés au terme de l’année 2007-2008.

Khadija EL HASSANI
L'Ă©conomiste



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