Un code de la route pour un Maroc plus sûr et moins meurtrier

Date 23-01-2009 00:33:51 | Sujet : Actualité Maroc

Le nouveau code de la route adopté par la Chambre des représentants constitue un arsenal fait de mesures préventives et répressives pour l'émergence d'un Maroc moins meurtrier et plus sûr le long de ses routes, a assuré M. Karim Ghellab, ministre de l'Equipement et du Transport.

Le texte "n'a pas une portée répressive", se défend d'emblée le ministre. Ce nouveau code "n'est pas venu pour renforcer le droit de la police et de la gendarmerie contre les usagers, combien même ils seraient en infraction", a-t-il souligné dans un entretien accordé à la MAP.
Au contraire, ce texte "apporte des droits nouveaux aux usagers qu'ils n'ont pas aujourd'hui et qui fait qu'ils sont souvent sous la pression parfois abusive des agents de contrôle", assure le ministre, mettant l'accent, au delà de l'aspect répressif, sur le "volet très important de droits nouveaux accordés au citoyen et à l'usager".

M. Ghellab s'est réjoui de l'adoption en première lecture de ce texte "global et équilibré", après une longue gestation ponctuée de bras de fer avec les professionnels du transport routier, résolu par le dialogue et de profonds débats au sein du secteur du transport et au niveau du Parlement.

Le ministre affiche son optimisme , convaincu que le nouveau code va hisser le Maroc au rang de "pays plus sûr et moins meurtrier que celui d'aujourd'hui".

Plus de 4000 morts en 2008

Le Maroc détient effectivement un triste record. Le constat est terrifiant: les accidents de la route fauchent de plus en plus de vies humaines avec une moyenne de 10 morts et de 120 blessés par jour. En 2008, le bilan provisoire dépasse le seuil de 4.000 morts pour la première fois dans l'histoire.

A ce rythme et en l'état actuel de la législation, la progression prévisible à l'horizon 2012 serait de près de 5.000 morts, soit 14 tués par jour.

En plus du drame humain, le coût pour la collectivité est à son tour très lourd : 11 milliards de dirhams par an (plus de 12 millions de dollars), soit le coût de plus de 20 unités industrielles pouvant employer plus de 500 ouvriers chacune. D'où l'urgence de s'attaquer à cette guerre que se livrent les Marocains au quotidien sur les routes.

11 milliards de DH de pertes

Le maître-mot du nouveau code s'appelle prévention. Mais il fallait également sévir en aggravant les sanctions pour réprimer la délinquance routière, la récidive et le sentiment d'impunité qui s'est installé dans l'esprit et le comportement de moult usagers de la route.

Au-delà des aspects techniques pour l'amélioration de la sécurité routière, le nouveau code a l'ambition de jeter un nouveau jalon dans la voie de la consolidation de l'Etat de droit, a souligné M. Ghellab.

"C'est un texte global qui vise un saut qualitatif global dans l'intérêt général pour maintenir le cap contre l'insécurité routière", a-t-il assuré.

Une réforme en prise avec les réalités

Pour M. Ghellab, le "souci du consensus a guidé l'action du gouvernement pour l'adaptation du texte, non pas à une réalité technique, mais à la réalité sociologique, socioprofessionnelle et politique" du pays.

Le but étant de rechercher les "bons équilibres et d'aboutir à une réforme conséquente en prise avec les réalités marocaines tout en restant dans l'objectif de lutte contre l'insécurité routière et de la réforme du secteur des transports".

A travers ce texte et les mesures d'accompagnement pour sa mise en Œuvre, le gouvernement a également la volonté "d'inciter à la mise à niveau du comportement de l'administration qui doit même précéder celle du citoyen".

Alcootest et permis à points

Le ministre a détaillé les différents mécanismes qui devraient contribuer à l'amélioration de la sécurité routière, à encourager et à motiver les bons conducteurs et à renforcer la prévention.

Parmi les innovations, l'introduction pour la première fois de l'alcootest pour lutter contre la conduite en état d'ébriété ou sous l'effet de drogues. Le taux d'alcoolémie à ne pas dépasser "va être extrêmement bas et conforme à la bonne pratique internationale" pour "inciter les gens à ne pas boire avant de conduire", a indiqué le ministre.

Autre nouveauté, l'instauration pour la première fois au Maroc, du système de permis à points. Le solde total sera de 24 points. A chaque infraction et selon la gravité, le conducteur perdra les points correspondants jusqu'au retrait de permis. Les infractions "ont été amendées et toutes été revues à la baisse", a rappelé le ministre. A titre d'exemple "une infraction courante, comme brûler un stop, qui est extrêmement grave, coûtera quatre points".

Quant aux amendes, elles sont passées, après amendement du projet, de 400, 750 et 1500 Dh, selon la gravité de l'infraction, à finalement 400, 600 et 900 Dh.

En ce qui concerne les sanctions privatives de liberté conséquence d'accidents qui ont conduit à un décès ou à des blessures, le nouveau code les ramène au niveau des peines de prison prévues dans le Code pénal et introduit la notion de circonstances aggravantes.

Au chapitre de l'amélioration de la sécurité routière, le texte instaure des conditions plus rigoureuses pour l'obtention du permis de conduire, définit de nouveaux cahiers de charges et une nouvelle organisation pour les auto-écoles.

Les centres de visite technique vont être "réformés en profondeur" par le biais d'une gestion unitaire en réseau qui ne permettra plus d'aller dans un autre centre si un autre a refusé de délivrer l'attestation.

Un permis professionnel est également instauré pour les centaines de milliers de chauffeurs professionnels (transports de marchandises, de voyageurs, taxis...).

Le nouveau code de la route leur apporte un statut, définit la carte professionnelle et exige une formation de base et continue tous les 5 ans, ainsi qu'un suivi médical de leur état de santé physique et mentale.

Ces chauffeurs doivent respecter des durées minimales de repos obligatoire et des durées maximales de conduite pour éviter les accidents dus à la somnolence et à la fatigue. Pour le ministre, il s'agit d'"un grand acquis sur le plan organisationnel".

Quant aux chauffards récidivistes et au comportement dangereux, ils seront obligés de passer un stage dans des centres de formation et de sensibilisation à l'éducation routière. Pour frapper les esprits, ils devront visiter les services d'urgence des hôpitaux et voir les accidentés de la route pour en comprendre la gravité.

Lutte contre la corruption et les "embuscades"

Par ailleurs, ce nouveau code de la route "confirme l'orientation du pays de renforcer l'Etat de droit et les droits des citoyens", plaide le ministre de l'équipement et du transport. Personne ne sera plus désormais sommé de payer l'amende tout de suite, sous peine de retrait de son permis. Le conducteur consentant ou contestant l'infraction a la possibilité de recourir aux tribunaux ou de payer plus tard l'amende à la trésorerie générale, à la Poste ou dans d'autres guichets de recouvrement qui seront agrées à l'avenir.

Une fois le permis retenu, l'agent de contrôle doit délivrer une autorisation valable 15 jours pour pouvoir continuer à conduire pendant cette période.

"Le droit à conduire est donc maintenu même en situation de non respect du code de la route, c'est un droit qui est aujourd'hui bafoué et non respecté", a souligné le ministre.

Autre mesure de protection, le paiement de l'amende n'est plus obligatoire en espèces, selon la pratique courante. Le conducteur peut s'en acquitter également par chèque ordinaire et non pas obligatoirement par chèque certifié, comme c'est le cas aujourd'hui.

Le but est d'éviter "toute transaction en argent liquide" avec l'agent de contrôle" pour limiter les marchandages ou le racket qui peuvent surgir dans ce genre de situations.

Ainsi, "vous n'êtes jamais sous la pression de l'agent de police même si vous êtes en faute", lance le ministre aux usagers de la route.

Protection des droits des usagers

Autre mesure de transparence : les agents de police et les gendarmes devront porter un badge avec nom, prénom, photo et numéro de matricule "pour que le citoyen sache à qui il a affaire".

Autre droit nouveau pour le citoyen : les points de contrôle devront faire l'objet d'une signalisation avancée, pour "lutter contre les comportements des agents de contrôle qui se cachent derrière les buissons pour surprendre les usagers de la route".

L'interception en pleine autoroute, autre anomalie, ne sera plus possible, le contrôle devant s'effectuer désormais à une barrière de péage.

D'autres dispositions sont prévues dont notamment l'utilisation de radars fixes automatiques pour la détection des excès de vitesse, l'une des causes majeures des accidents, note le ministre.

Les 155 radars fixes déjà déployés sont des "instruments objectifs qui suppriment l'intervention humaine" et partant les transactions frauduleuses.

En plus des balances fixes, l'utilisation de balances automatiques pour déceler les surcharges des camions - trois sont déjà installés, à Casa, Fès et Rabat- est également instaurée en vue de limiter, là aussi, l'intervention humaine.

Ainsi, "tous les pouvoirs de l'administration et de la justice ont été revus.

Le code actuellement en vigueur donne une très grande marge de manœuvre à l'administration", constate M. Ghellab.

"Tantôt on retire le permis, tantôt on met le véhicule à la fourrière, on fait payer ou ne pas faire payer une amende. Cette marge de négociation qui est dans le code actuel ouvre la porte à des dérapages, à la corruption".

Définition précise des infractions

"Désormais et grâce à la définition extrêmement claire et précise des infractions et des sanctions, il n'y aura plus de place à l'interprétation chez l'administration et même les marges d'évaluation qui restent nécessaires pour la justice ont été revues à la baisse dans un souci de transparence", a -t-il affirmé .

"Si on veut avoir une conduite tranquille et être à l'abri de ces sanctions, ne payer ni amende, ni être redevable d'une quelconque corruption, il suffit de respecter le code de la route pour protéger votre vie et vos biens, la vie et les biens d'autrui, c'est cela l'objectif", a conclu le ministre.

Reste maintenant l'important travail de clarification et d'information à mener auprès du grand public et la mise en œuvre des plans d'action conséquents au niveau des départements directement concernés, notamment le Transport, l'Intérieur et la Gendarmerie Royale pour la "mise à niveau du comportement de l'administration et du citoyen" que le ministre appelle de ses vœux.

Mansour Madani (MAP)



Cet article provient de AgadirInou.Com - Le Portail de la ville d'Agadir et de ses Régions
http://www.agadirinou.com

L'adresse de cet article est :
http://www.agadirinou.com/modules/news/article.php?storyid=3748