Economie: PĂȘche clandestine : Qui arrĂȘtera les braconniers ?

PostĂ© par: Visiteursur 10-06-2008 00:07:24 1695 lectures En pleine pĂ©riode d’arrĂȘt biologique, des braconniers s’adonnent toujours au trafic du poulpe. « Avec des barques clandestines, des chambriĂšres ou encore d’autres moyens de fortune, ceux-lĂ  continuent de pĂ©cher illĂ©galement, notamment dans le sud de Boujdour », se plaignent des opĂ©rateurs de Dakhla.

POUR transporter leur marchandise, les braconniers utilisent des voitures 4x4 qui ramĂšnent le poulpe Ă  partir des points de dĂ©barquement clandestins Ă  LaĂąyoune. DestinĂ© Ă  l’export Ă  10 %, le poulpe est transportĂ© Ă  bord de camions amĂ©nagĂ©s vers le port d’Agadir. Souvent, ce sont des unitĂ©s industrielles de cette ville qui profitent de la prĂ©cieuse pĂȘche. « Pour masquer ce trafic, les bons de pesĂ©e sont dĂ©livrĂ©s aux receleurs dans les halles de poissons des autres ports », explique Moulay Hassan Talbi, un opĂ©rateur de la pĂȘche artisanale de Dakhla. En fait, affirme-t-il, les documents dĂ©livrĂ©s Ă  ces unitĂ©s sont falsifiĂ©s. D’aprĂšs lui, c’est une opĂ©ration de vente fictive qui se passe Ă  Essaouira, Tarfaya, Safi ou encore Bouznika, par exemple. Autant de destinations qui deviennent, aujourd’hui, des ports virtuels de dĂ©barquement de poulpe provenant du sud. A noter que les bons de pesĂ©e dont il s’agit sont nĂ©cessaires pour toute opĂ©ration de contrĂŽle. Ils servent surtout pour se procurer un certificat vĂ©tĂ©rinaire ainsi que les autorisations nĂ©cessaires pour l’export.


Une chose est sĂ»re, les contrebandiers sont trĂšs actifs en ce moment de repos biologique. En tĂ©moignent les nombreuses quantitĂ©s qui ont Ă©tĂ© saisies, derniĂšrement. Il y a une semaine, deux camions transportant 15,9 tonnes de poulpe ont Ă©tĂ© interceptĂ©s par la gendarmerie royale Ă  Ikhfanir, situĂ© entre Tan Tan et LaĂąyoune. Le butin a Ă©tĂ© vendu Ă  37,84 dirhams le kilo, soit une valeur totale de 605.235 de dirhams. La marchandise allait ĂȘtre acheminĂ©e vers Agadir pour ĂȘtre livrĂ©e Ă  une usine de transformation de poulpe. Laquelle usine allait, elle aussi, se procurer des bons de pesĂ©e en provenance d’autres ports, avant d’exporter le poisson Ă  l’étranger (Europe et Asie), selon une source bien informĂ©e.

Une autre quantitĂ© de 14 tonnes avait Ă©tĂ© saisie dans une unitĂ© industrielle, Ă  Agadir, le 15 mai dernier. De mĂȘme, les Ă©lĂ©ments de la gendarmerie de LaĂąyoune avaient saisi 8 tonnes de poulpe pĂȘchĂ©es illicitement. Un camion transportant la mĂȘme quantitĂ© s’est renversĂ© le 17 mai dernier, encore Ă  Ikhfanir. Et le 24 mai dernier, quatre voitures 4x4 dont trois Ă  Tan Tan et une Ă  Boujdour, ont Ă©tĂ© interceptĂ©es par la gendarmerie royale. C’est dire l’ampleur de ce phĂ©nomĂšne. D’aprĂšs une source proche du dossier, ce sont les unitĂ©s de transformation d’Agadir qui accueillent, le plus souvent, l’essentiel des quantitĂ©s de poulpe pĂȘchĂ©es par les contrebandiers.

Le manque Ă  gagner pour l’Etat est considĂ©rable. Selon les chiffres officiels, sur les six derniĂšres annĂ©es, plus de 7 milliards de dirhams ont Ă©chappĂ© au secteur formel. VoilĂ  pourquoi le trafic du poulpe fait beaucoup de mĂ©contents. En tout cas, on grince des dents du cĂŽtĂ© des membres de l’association de la pĂȘche hauturiĂšre, de l’association des officiers de la pĂȘche hauturiĂšre, du syndicat national des officiers et marins de la pĂȘche hauturiĂšre ainsi que du cĂŽtĂ© des professionnels de la pĂȘche artisanale. Ces derniers sont mĂȘme allĂ©s jusqu’à dĂ©poser, en mai dernier, plusieurs plaintes auprĂšs des procureurs du Roi de plusieurs tribunaux du pays pour dĂ©noncer le trafic de poulpe. Egalement, une rencontre a eu lieu, le 14 mai dernier, entre les professionnels et le ministre de tutelle, Aziz Akhennouch, au siĂšge du dĂ©partement de la pĂȘche maritime Ă  Rabat. A l’ordre du jour, cette question rĂ©currente relative Ă  la contrebande du poulpe qui met en danger les richesses halieutiques du pays. « Depuis le 1er mai dernier, nous sommes normalement en pĂ©riode d’arrĂȘt biologique, pourtant, des braconniers continuent de pĂȘcher illicitement le poulpe, notamment dans le sud de Boujdour connu pour ses richesses en cette matiĂšre », dĂ©nonce Moulay Hassan Talbi.

Il y a lieu de souligner qu’en 46 jours seulement, le chiffre rĂ©alisĂ© par la pĂȘche artisanale du poulpe Ă  Dakhla, par exemple, s’élĂšve Ă  quelque 500 millions de dirhams. Et ce, de janvier Ă  fĂ©vrier de l’annĂ©e en cours.

Rappelons que dans le cadre du plan d’amĂ©nagement de la pĂȘche maritime, les professionnels de la pĂȘche artisanale sont autorisĂ©s Ă  pĂȘcher le poulpe Ă  hauteur de 26%. En revanche, ceux de la pĂȘche hauturiĂšre s’accaparent 63% de cette activitĂ© et les professionnels de la pĂȘche cĂŽtiĂšre, quant Ă  eux, sont autorisĂ©s Ă  pĂȘcher 11% de poulpe. Mais, ces quotas ne sont jamais respectĂ©s.

Le reporter