Actualité Agadir et région: 4ème édition du festival Agadir-ciné : Migrations: maillage de tranches de vie

Posté par: Visiteursur 28-12-2006 22:00:00 1563 lectures Arts et cultures : Ici et ailleurs
Sous le Haut Patronage de Sa Majesté le Roi Mohammed VI, l’association l’initiative culturelle à Agadir continue son bonhomme de chemin en créant encore une fois, l’événement durant cinq jours d’affiliée (du 12 au 16 décembre) au cinéma Rialto et d’autres lieux, notamment la Faculté des lettres et Sciences Humaines, l’Ecole Nationale de Commerce et de Gestion, l’Institution Founty, avec des cérémonies dînatoires dans de grands hôtels de la ville, chaque soirée Le festival Agadir-Ciné est devenu non seulement, après quatre années consécutives, une tradition événementielle, mais une réelle rencontre des gens de l’art et de la culture d’ici et d’ailleurs. C’est une véritable passerelle entre les marocains du «Maroc» et les marocains ou plutôt les maghrébins de «l’étranger». Un rendez-vous annuel, désormais, qui permet le maillage des modes de vie différents de la même origine, le brassage des conceptions diverses d’une source identique et le mélange des perspectives d’avenir d’une entame similaire. Le créneau migration est, en fait, un bon leitmotiv pour que «les fils du bled» retrouvent l’arôme de la poussière, le charme de l’azur et les délices du terroir. Au-delà des congratulations et des retrouvailles, le phénomène migratoire a été sérieusement et profondément décortiqué et défriché par des intellectuels maghrébins et occidentaux, à travers les projections des films et des tables rondes. Dès le départ, ou mit le ton sur cette problématique, juste après les échanges protocolaires de la cérémonie d’ouverture où jaillissait le compliment de la reconnaissance et du rapprochement.


Ferveur de l’image
De toute évidence, la terreur ardente des films montés par des fervents militants de la question migratoire a suscité d’abord l’administration du grand public par la qualité de l’image et la force du verbe, ensuite l’émotion et l’enseignement que dégagent les massages prônés.
D’autant plus que pas moins de cinq avant premières ont crevé l’écran, notamment le film documentaire du coup d’envoi, en l’occurrence la couleur du sacrifice qui, à lui seul, a retenu le souffle et forcé l’espace des spectateurs. Les témoignages des tirailleurs survivants marocains ainsi que ceux de la communauté belge et française ayant côtoyé ces braves combattants ont profondément marqué et conquis tout le monde. Plus de 20 films (documentaires, court et long métrages) se sont défilés tout au long de la période du festival, avec tous un dénominateur commun : vie et intégration au pays d’accueil.

Activités parallèles
* Cinéma à l’université : en partenariat avec l’université Ibn Zohr, des projections de courts métrages ont été programmées au profit des étudiants universitaires en présence des artistes acteurs et metteurs en scène dans un souci de créer une osmose entre les créateurs du 7ème art et les étudiants passionnés. Des ateliers de formation sur les techniques cinématographiques animés par des spécialistes suite aux succès enregistrés lors de la dernière édition.

* Caravane du festival : La caravane cinématographique du festival a donné également une autre dimension en projetant des films dans les localités périphériques de la ville d’Agadir.

* Rencontre à l’école Founty : Les festivaliers ont eu droit à une rencontre conviviale à l’école Founty d’Agadir où la chaleur de l’accueil et le plaisir de la symbiose étaient de mise. Pourquoi Founty ? D’abord, comme son nom le porte bien, c’est une fontaine de lumière humaine qui se presse toujours à abriter toutes les bonnes actions et à les appuyer avec amour et conviction, à l’image de Ahmed Bellouch, son directeur toujours avenant et cordial. Ensuite, c’est aussi un havre de création et d’innovation où les stars du cinéma se sont sentis bien chez eux en s’exprimant à souhait dans une ambiance bon enfant.

Hommages émouvants à Miftah et Smaîn :Moments forts et chaleureux que ceux vécus lors de cette soirée dédiée à Miftah et Smaîn, deux talentueux artistes qui ont marqué de leurs empreintes indélébiles le cinéma et le théâtre, pendant des décennies. Vivement ovationnés par le public d’Agadir, les deux vedettes maghrébines ont eu droit à des témoignages des plus pathétiques. Smaîn et Miftah deux grandes figures du 7ème art ont, ce jour-là, fait vibrer et frémir les cœurs de l’assistance larmoyante. Smaîn quitte son Algérie natale en 1960 pour la France. Après le décès de ses parents, il fut adopté par une maman marocaine du nom de «Izza» du Souss. Il n’a que 22 ans quand il se lance dans sa carrière d’humoriste, se produisant dans différents lieux parisiens.

En 1983, Smaîn rejoint l’équipe du Petit Théâtre de Bouvard. En 1986, Smaîn interprète son premier One Man show, «A star is beur» et connaît un véritable succès. Il devient une valeur montante parmi les comiques. Il a également joué dans «l’¦il au beur (re) noir, César du meilleur premier film». Rebelote, en 2005, est un nouveau succès. Apprécié pour son humour et sa sensibilité, Smaîn suscite l’adhésion de la critique, du public mais aussi de ses confrères.

Quant à Miftah, devenu l’une des pièces maîtresses de Masrah Ennasse, fut attiré par le cinéma dès 1973 dans «Impossible objet» de John Frankenheimer. Plusieurs années plus tard, ce dernier l’invite à Los Angeles en 1991/ Il y restera un an et demi.

Nostalgique, il reprend le chemin de son pays où il enchaîne les tournages et les tournées théâtrales, mais sans conviction. Ses pièces n’ont pas de public. Il traverse plusieurs années de disette, entrecoupées en 1989 par le «Vent de la Toussaint» de Gilles Behat et «Articulo 2» de Maurizio Zaccaro en 1993, où il tient la vedette. Il lui redonne certes espoir, mais reste sceptique quant à la production nationale qui ne l’emballe point, malgré la multitude de projets qu’on lui propose. Sa bonne étoile naîtra avec le nouveau siècle. Très sollicité par les producteurs syriens il y trouvera une compensation inespérée et une reconnaissance de ses mérites, d’autant plus que la succession de ces ¦uvres grandioses finit par confirmer son talent de comédien hors pair. Dès 2005, l’autoproduction et l’autoréalisation de ses propres ¦uvres, nées de son propre imaginaire, il se lance dans le tournage de ses courts métrages «Les nus pieds», «L’errant» et «Accordparental». Ceci en attendant de s’engager aussitôt que possible dans ses projets de longs métrages savamment pensés et passionnément écritsŠ Dans un entrain de charisme sans égal, Abdelilah Ajil, lors de la cérémonie d’hommage, il se déploya à fond pour sortir des entrailles le célèbre chant populaire de Nass Al Ghiwane «Sinaya», dédié à Miftah, toujours si humble et sobre jusqu’à l’effacement, en dépit des jolis mots dits à son égard. Nass Al Ghiwane, l’emblématique troupe aux côtés de Lemchaheb, faisait ses premières virtuosités à Derb Moulay Chérif au Hay Mohammadi, tout comme Miftah. Rachid Louali, dans son témoignage émotionnel vibrant, enchaîne pour relater encore de plus belle cette humilité exemplaire de Miftah qui met pour son propre hommage un vestimentaire anodin alors que quelques jours auparavant, il se donne la peine de porter un costar blanc, papillon rouge pour fêter le festival international de Marrakech. Louali taquine encore plus son collège doyen baptisé Aouita par rapport à lui qui se vante, néanmoins, de courir avec lui dans la même piste, en révélant qu’il vient d’acquérir une bien modeste bagnole au moment, enfin «aisé» comme il est, il pouvait se permettre de s’approprier une marque plus snob.

Au moment de s’expliquer, Louali, avec une sorte de mise en scène des grandes tragédies classiques, évoqua comment la mère de Miftah, au temps de la résistance, a reçu une balle alors qu’elle portait sur son dos le bébé qu’elle évitait d’écraser en s’écroulant inerte. Ce bébé qui survivait aux soubresauts de sa mère défunte n’était autre que Miftah. La salle, émue et submergé par cette grandeur, n’en revenait pas.

Hommage spécial : Si le festival Agadir-ciné, cinéma et migrations permet tout cet éclat et rend, à commencer par Hamidou Benessaoud, c’est grâce à cette association animée par une équipe dynamique et persévérante. Agadir a pu se doter d’un événement de cinéma bien à ses débuts et ne cesse de faire ses preuves, c’est à l’honneur de cette équipe et de ceux qui croient et qui finissent également à croire à cet événement d’envergure. Tous nos hommages, aux initiateurs de ce rendez-vous désormais, bien ancré dans la ville.

Source : Al Bayane