Actualité Agadir et région: Bodyboard : Reportage : Sur les vagues de Taghazout

Posté par: Visiteursur 29-11-2007 22:00:00 3087 lectures Le Maroc a accueilli, du 23 au 26 novembre, la dernière étape du circuit européen de Bodyboard. Le Portugais Silvano Lourenço l’a emporté chez les hommes. Chez les femmes, la Basque espagnole Eunate Aguirre a remporté son premier titre européen.

Déconvenue chez les riders ultramarins, le Réunionnais Charles Maurot s’est arrêté en huitièmes et la Guadeloupéenne Héloïse Bourroux en quarts de finale.


Au-delà de la réussite de la compétition, le rendez-vous d’Agadir a surtout permis de voir à l’œuvre le professionnalisme de la Fédération royale marocaine de surf et de bodyboard sur un tel événement. Pour espérer peser en importance au sein de la Fédération européenne de surf et à terme organiser un challenge de première importance mondiale, la fédération marocaine, conjointement avec le département marocain du tourisme, vont devoir s’atteler à préserver l’authenticité du lieu par une politique de développement durable.

Un enjeu de taille
Du 23 au 26 novembre, à Agadir, Mohamed Kadmiri, le puissant président de la Fédération royale marocaine de surf et de bodyboard (FRMSB), s’est employé à organiser au mieux la 4ème étape finale du circuit européen de bodyboard. L’enjeu était de taille. Le pays nord-africain le plus à l’Ouest du Maghreb jouait gros. Nouvellement intégrée à la Fédération européenne de surf (ESF en anglais : European Surfing Federation), la FRMS avait à cœur de démontrer au monde du surf que l’emplacement d’une compétition au pays des Lions de l’Atlas, dans le calendrier européen, n’était en rien une anomalie. « Le Maroc est une porte vers l’Europe. Au niveau africain, il n’y a pas de confédération de ce type. Nous avons jugé utile de nous affilier aux instances internationales. Nous avons besoin d’apprendre et nous sommes toujours réceptifs à ce qui peut nous faire progresser. Pour la réussite de cette compétition nous avons tablé sur un budget global d’environ 1,4 million de dirhams, l’équivalent de 140 000 euros. Cela nous a demandé beaucoup d’efforts. Il nous a fallu faire appel aux sponsors privés comme institutionnels, à commencer par le département du tourisme ou encore le ministère de l’intérieur », a expliqué le dirigeant numéro un du surf et du bodyboard marocain devant une salle des conférences de l’hôtel Insane aux trois quarts pleine.

Entrée du Maroc dans le surf européen
Rien n’a été laissé au hasard par les organisateurs. La tenue de l’étape marocaine, dans le chef-lieu régional du Souss, coïncidait, à quelques jours près, avec l’ouverture d’un séminaire international sur le surf. De nombreux champions, des partenaires privés de renom liés à la discipline et d’éminentes personnalités devaient se retrouver pour réfléchir autour du surf et du bodyboard. Rui Félix, le président de l’ESF, a confirmé, devant un public local conquis, l’entrée, par la grande porte, du Maroc dans la plus éminente structure du surf européen : « A partir de cette année, la fédération marocaine fait partie de la fédération européenne. C’est un plaisir pour nous et pour les riders de l’accueillir. Agadir est une étape importante dans le circuit. Nous espérons voir de plus en plus de Marocains prendre part à nos compétitions. C’est fort possible au vu du potentiel que recèle ce pays. »

Haut patronage du roi
Avant que les riders espagnols, portugais, allemands, marocains ou encore français s’affrontent, le vendredi 23 novembre au matin, sur l’un des plus fameux spots [vague] des alentours de Taghazout, il s’agissait pour le numéro un de la fédération de surf et sa garde rapprochée de rassembler les différentes composantes de ce mouvement sportif en plein essor et d’encourager les jeunes espoirs locaux à poursuivre leur progression (Imane Zagraoui, Abdelaati Ourchan, Khalil Azzaher, Adnane Benslimane, Salah Miftah, Fatima-Zahra Guimmi ou Abdelhalek Elharim...) par un don de matériel, de combinaisons en lycra et de planches neuves. Mais, il fallait surtout officialiser devant la presse internationale spécialisée l’ancrage définitif du royaume chérifien au gotha européen. Les instances fédérales et son partenaire le département du tourisme marocain n’ont pas manqué de souligner que l’organisation d’une telle compétition ne pouvait se faire sans le haut patronage du roi Mohammed VI.

La présence de l’Office national marocain du tourisme auprès de la Fédération royale marocaine de surf marque aussi une volonté pour les deux secteurs d’activités de collaborer main dans la main. Qui dit bodyboard et surf dit forcément littoral marin et qui dit littoral marin dit tourisme balnéaire et donc loisirs. La destination Maroc est en vogue et le surf marocain est en plein boum. De nombreux surfers et bodyboarders en quête de la vague marocaine n’hésitent pas à parcourir des milliers de kilomètres pour venir glisser avec leurs planches sur la crête de Taghazout ou de Safi. Sur une côte rebelle ocre et crénelée, ignorée des hommes, à l’exception des pêcheurs, les riders viennent encore aujourd’hui, sacs sur le dos et planches en bandoulières défier ces monuments de la nature dans ce cadre d’une exceptionnelle beauté. L’enjeu pour le ministère du tourisme marocain qui s’est joint à la Fédération royale marocaine consisterait à développer le tourisme de la région d’Agadir sans pour autant dénaturer le charme de sa côte.

La ville d’Agadir est l’une des lieux les plus touristiques du pays. L’office national du tourisme du Maroc entend faire de cette ville la destination du futur. On parle d’un investissement financier à hauteur de 37 milliards de dirhams. Il est notamment prévu de « renforcer l’hébergement en front de mer par la création de cinq nouveaux hôtels 5 étoiles, de quatre resort balnéaire » dont un à Taghazout. D’où les craintes de certains observateurs locaux comme étrangers de voir bétonner l’une des plus grandes et des plus belles baies du monde. Le site a des atouts naturels incontestables mais la question des déchets rejetés par la mer ou des ordures ménagères et industrielles demeure encore un sujet sensible. Lorsque la problématique de la gestion des ordures en bord de plage a été abordée par certains journalistes, le débat s’est aussitôt tendu.

Echanges parfois vifs
La table ronde à laquelle ont participé les acteurs de la scène de glisse marocaine et les journalistes internationaux invités (Australie, Espagne, Etats-Unis, Portugal, France) à l’occasion de cet événement a été organisée à la demande des dirigeants de la FRMSB et de l’Office national du tourisme. Les échanges ont été parfois vifs, mais ils ont eu le mérite d’aplanir des problèmes majeurs. Cela a de surcroît montré une réelle envie des instances marocaines d’aller de l’avant, quitte à entendre parfois des arguments désagréables. Après avoir installé, la veille de la compétition, quelques poubelles tout les vingt mètres, les organisateurs de l’étape finale du circuit européen de bodyboard n’ont pas manqué d’humour, le lendemain, en donnant des sacs plastiques aux journalistes pour aider les bénévoles à nettoyer la plage et ses environs.

Hommes

1. Silvano Lourenço (POR)
2. Raul Reguera (ESP)
3. David Perez (ESP)
4. Elosua Beniat (ESP)

Femmes

1. Eunate Aguirre (ESP)
2. Rita Pirez (POR)
3. Joana Schenker (ALL)
4. Deva Martin Solar (ESP)


Succès ibérique
Le Portugais Silvano Lourenço a remporté le championnat d’Europe individuel de bodyboard 2007 devant les Espagnols Raul Reguera, David Perez et Elosua Beniat. La Péninsule ibérique a fait un carton, du 23 au 25 novembre dernier, en plaçant une nouvelle fois un des siens sur le podium féminin en la personne de l’Espagnole Eunate Aguirre. La Basque s’est imposée devant la Portugaise Rita Pirez et l’Allemande Joana Schenker. Pour la petite histoire Khalil Zaher, le champion du Maroc, a été éliminé en quarts de finale. Il y avait plus de 80 participants étrangers, dont une dizaine de Marocains. Et le public y était fort nombreux.

Coup d’arrêt pour l’Outre-mer
Les bodyboarders français n’ont pas été à la fête. Du côté des Ultramarins, la Guadeloupéenne Héloïse Bourroux, multiple championne de France, s’est inclinée en quarts de finale. Pour le cas du Réunionnais Charles Maurot, son chemin s’est arrêté en huitièmes de finale.

La règle du jeu
Les participants étaient regroupés dans des poules de quatre et, durant vingt minutes, il leur fallait convaincre, prendre la meilleure vague, effectuer les manœuvres les plus techniques (el rollo, reverse, ARS ou take off) et de manière la plus tactique possible. Sur leurs planches courtes, que le jargon des surfers nomme "biscotte", les bodyboarders doivent faire preuve également de sens marin, pour le placement, et d’équilibre pour pouvoir marquer le plus de points.

Esthétisme et efficacité
Les juges européens, assistés de juges marocains, se montraient sensibles aux prises de risque et à la difficulté des figures réalisées. En fonction de la témérité et de la réussite d’un mouvement le nombre de points étaient plus nombreux. Les deux boadyborders les mieux notés se qualifiaient pour le tour suivant.

Réussite de l’organisation
L’Agenda 2007 de la Fédération européenne de surf (FES) a inscrit le Maroc à son programme. Membre de la FES et affilié à l’Association internationale de surf (AIS), plus rien n’empêche le royaume chérifien de devenir l’une des places fortes des sports de glisse en mer.

A la découverte de Taghazout
Taghazout est l’épicentre du surf marocain. Le petit port de pêche est situé à deux heures de Safi, un autre site légendaire du surf local, et à deux heures des côtes mauritaniennes. Le lieu le plus prestigieux pour glisser sur la vague est la pointe des ancres. Les vagues y sont superbes. La légende de Taghazout est née avec la venue des surfers voyageurs dans la seconde moitié des années 70. Dix ans plus tard, dans les années 80, des Français et des Portugais sont venus à leur tour découvrir la capitale du surf nord-africain. Certains d’entre eux ont laissé du matériel à de jeunes Marocains.

L’intérêt de ces derniers pour le bodyboard et le surf ne se dément plus. Aujourd’hui, le circuit européen en compte un certain nombre et le championnat de France n’ignore pas le talent d’un Abdelkhalek Elharim (champion du Maroc entre 2000 et 2004). Beaucoup s’y rendent pour y faire des compétitions et ne s’en tirent pas trop mal. Mohamed Kadmiri, le président de la Fédération royale marocaine de surf et de bodyboard (FRMSB), insiste désormais sur le rôle d’ambassadeur que jouent ces riders. Lors de son intervention à Agadir, le 22 novembre dernier, il a souligné à quel point la jeunesse marocaine se devait d’avoir des valeurs. Que le champion marocain serait désormais indissociable d’un comportement exemplaire. A terme, la Fédération royale marocaine de surf, qui continue à bâtir une stratégie de formation de jeunes cadres, espère obtenir dans les années à venir l’organisation d’une épreuve professionnelle d’envergure. Au vu de l’engouement populaire pour la 4ème étape finale du circuit européen de bodyboard, notamment quand le nombreux public en liesse est parti féliciter d’un seul homme le champion d’Europe de bodyboard 2007, il est fort probable que le Maroc devienne de plus en plus une place forte des sports de glisse. Encore une fois, cela passe par la prise en compte de la préservation du cadre naturel. Faute de quoi, les bodyboarders et les surfers pourraient bouder pour longtemps le spot du kilomètre 14.

RFO